La question de savoir comment obtenir la vision de ses péchés, ou la connaissance de soi, de son vieil homme, est au centre de la vie spirituelle. Saint Ignace en a magnifiquement montré la logique : seul celui qui se voit périr a besoin d ‘un sauveur , au contraire, les « sains », les bien portants (cf. Mt 9, 12) n’ont pas besoin du Christ. Par conséquent, si l’on veut croire au Christ de manière orthodoxe, cette vision devient le but principal de son effort ascétique, et en même temps, le principal critère de son authenticité.
Les bonnes actions
Ainsi, les efforts ascétiques, ou leur équivalent – ainsi que toutes les vertus qui ne conduisent pas à un tel résultat sont en fait de faux exploits ascétiques – et la vie perd son sens. L’Apôtre Paul en parle dans son épître à Timothée, lorsqu’il dit : Et si un homme lutte aussi pour la maîtrise des vertus, il n’est pourtant pas couronné s’il ne lutte selon les règles (2 Tm 2:5). Saint Isaac le Syrien en parle encore plus précisément « La récompense n’est pas pour la vertu, ni pour le travail à cause de la vertu, mais pour l’humilité qui naît des deux. Si l’humilité fait défaut, alors les deux premiers sont vains. »[Discours ascétiques homélie 34] Cette déclaration ouvre encore une autre page importante dans la compréhension de la vie spirituelle et de ses lois : ni l’ascèse ni les travaux en eux-mêmes ne peuvent apporter à une personne les bénédictions du Royaume de Dieu, qui est en nous (Lc 17, 21), mais seulement l’humilité qui vient d’eux. Si l’humilité n’est pas acquise, tous les travaux et vertus ascétiques n’ont aucun sens. Cependant, seul le travail dans l’accomplissement des commandements du Christ enseigne l’humilité à l’homme. C’est ainsi qu’est expliquée une question théologique complexe sur la relation entre la foi et les bonnes œuvres en matière de salut. Saint Ignace consacre une grande attention à cette question. Il la voit sous deux aspects : premièrement, dans le sens de la compréhension de la nécessité du sacrifice du Christ ; et deuxièmement, en ce qui concerne la perfection chrétienne. Ses conclusions, procédant comme elles le font de l’expérience patristique, ne sont pas des sujets ordinaires pour la théologie académique. Il écrit : « Si les bonnes actions accomplies selon les sentiments du cœur apportaient le salut, alors la venue du Christ aurait été superflue ». « Malheureux est l’homme qui se contente de sa propre justice humaine, car il n’a pas besoin du Christ » . « Telle est la qualité naturelle de tous les efforts ascétiques corporels et des bonnes actions visibles. Si nous pensons que les faire est notre sacrifice à Dieu, et pas seulement la réparation de notre dette incommensurable, alors nos bonnes actions et notre ascèse deviennent en nous la source d’un orgueil destructeur d’âme ». Saint Ignace écrit même que celui qui accomplit la justice selon les vues humaines est rempli d’une bonne opinion de soi, d’une considération élevée sur soi-même et il s’illusionne… une telle personne réplique avec hargne et esprit de vengeance quiconque ose ouvrir la bouche pour prononcer la contradiction la plus fondée et la mieux intentionnée de sa justice. Il se considère digne, le plus digne des récompenses terrestres et célestes . De là, nous pouvons comprendre l’appel du saint, et qui est: ne cherchez pas la perfection chrétienne dans les vertus humaines. Ce n’est pas là qu’elle se trouve; elle est mystiquement conservée dans la Croix du Christ. Cette pensée contredit directement la croyance répandue selon laquelle les soi-disant «bonnes actions» sont toujours bonnes et nous aident à notre salut, quelle que soit la motivation d’une personne à les faire. En réalité, la droiture et la vertu de l’ancien et du nouvel homme ne se complètent pas mutuellement, mais plutôt s’excluent mutuellement.
La raison en est suffisamment évidente. Les bonnes œuvres ne sont pas une fin, mais un moyen d’accomplir le commandement suprême de l’amour. Mais elles peuvent aussi être faites de manière calculatrice, hypocrite et par ambition et fierté. (Quand une personne voit des nécessiteux mais paie pour des dorures sur les dômes des églises, ou construit une église là où il n’y a pas vraiment besoin d’une église, il est clair qu’elle ne sert pas Dieu, mais sa propre vanité.) Des actions qui ne sont pas faites pour l’accomplissement des commandements aveuglent une personne par leur signification, la gonflent, la rendent grande à ses propres yeux, exaltent son ego et la séparent ainsi du Christ. Mais l’accomplissement des commandements de l’amour du prochain révèle les passions d’une personne à elle-même, telles que : plaire aux gens, la bonne opinion de soi, l’hypocrisie, etc. Cela lui révèle qu’il ne peut faire aucune bonne action sans péché. Cela humilie une personne et la conduit au Christ. Saint Jean de Gaza a dit: « Le vrai travail ne peut être fait sans humilité, car l’ascèse en soi est vaine et considérée comme rien. » En d’autres termes, les vertus et les efforts ascétiques peuvent également être extrêmement nocifs s’ils ne sont pas fondés sur la connaissance du péché caché dans l’âme et ne conduisent pas à une conscience encore plus profonde de celui-ci. Saint Ignace enseigne : « Il faut d’abord voir son péché, puis s’en purifier par la repentance et atteindre un cœur pur, sans lequel il est impossible d’accomplir une seule bonne action en toute pureté ». « L’ascète, écrit-il, vient seulement de commencer à les faire [les bonnes actions] avant de voir qu’il les fait tout à fait insuffisamment, impurement… Son activité accrue selon les Évangiles lui montre de plus en plus clairement l’insuffisance de ses vertus. , la multitude de ses égarements et de ses motivations, l’état malheureux de sa nature déchue… Il reconnaît que son accomplissement des commandements est une déformation et une souillure de ceux-ci . Par conséquent, les saints, poursuit-il, « ont nettoyé leurs vertus avec des flots de larmes, comme s’il s’agissait de péchés »
( A suivre )
Source :https://pravoslavie.ru/53476.html