La prière et la pureté du cœur (V)
Mes bien aimés, entrons dans les détails des conditions pour que la prière soit agrée par le Créateur.
La première condition est la pureté du cœur… « Accorde-moi Seigneur un cœur pur et renouvelle dans mes entrailles un esprit de droiture. Ne me rejette pas de devant Ta face et ne me retire pas Ton Esprit Saint » (Ps.50). Sans pureté du cœur Dieu n’écoute pas notre prière.
Saint Antoine le Grand qui a vécu dans le désert d’Egypte au IVème siècle et qu’on appelle le père des moines affirme : « Bienheureux les cœurs purs car ils verront Dieu, car sans pureté du corps et du cœur personne ne peut être parfait. Veillez mes enfants à garder vos cœurs de la haine, de la colère, de la médisance, du jugement des autres, de peur que la mort ne survienne soudainement et ne vous surprenne car vous seriez alors comptés comme des meurtriers, car celui qui hait son frère commet un meurtre sur une âme. Celui parmi vous qui subit l’injustice, qu’il accepte (cette injustice) avec joie et laisse le juste jugement au Juste Juge. Mais celui qui commet une injustice envers un frère, qu’il accourt vers lui pour le supplier de lui pardonner, et ne laissez pas le soleil se coucher sur votre colère ».
Par conséquent, la condition nécessaire pour le succès de la prière est la purification du cœur des passions en général et de l’attachement à n’importe quelle chose en particulier.
Rappelons à présent les passions lesquelles, si elles font leur nid en nous vont nous éloigner de la prière. Ces passions sont au nombre de huit selon le classement fait par les saints Pères ascètes : la gourmandise (aimer « son ventre »), la luxure (adultère), l’amour de l’argent (et la convoitise des biens matériels),la colère, la tristesse (découragement, abattement avec anxiété et peur), la paresse (paresse à faire le bien et à pratiquer les commandements évangéliques), l’égoïsme (faire de soi son idole) et enfin la dernière passion mais la plus dangereuse, l’orgueil. Toutes ces passions nous encombrent et nous privent de la pureté du cœur, donc d’une prière qui sort d’un cœur brisé et humilié car Dieu ne méprise pas un cœur brisé et humilié (Ps.50).
Quand à parvenir à la pureté du cœur, cela se fait par le souvenir constant de Dieu et le « nettoyage » des passions dont il a été question afin que le souvenir de Dieu ne soit pas obscurci par des pensées parasites…notre prière aura dans ce cas une grande efficacité…les pères ont établi trois étapes pour la prière : la purification , l’illumination et la vision de Dieu (déification).
L’indice qui montre que le cœur est sur le chemin de la purification est en premier lieu le cœur qui s’accuse seul disant : « Seigneur aie pitié de moi pêcheur ». Ce ne sont pas les autres qui sont pêcheurs, ne mettons pas sur eux les fautes devant Dieu et devant les hommes. Le cœur purifié ne juge personne, même les pêcheurs, car il sait par la grâce de Dieu que le pêché et le mal sont des accidents, que l’âme a été crée bonne à l’image de Dieu et que le mal n’est pas dans sa nature fondamentale.
La pureté du cœur suppose que l’intellect est purifié et commence à connaître Dieu.
Saint Maxime le confesseur (VIIème siècle), affirme que dans l’homme, l’intellect, le désir et la volonté sont une trinité semblable à la Sainte Trinité. Ces trois éléments doivent être unifiés dans l’homme et orientées vers Dieu. « Que l’homme connaisse Dieu, qu’il le désire et l’aime en premier, que sa volonté soit conforme à celle de Dieu, et ainsi on réalise le commandement d’aimer Dieu de tout son cœur, de toute son intelligence et de toutes ses forces ».
Et Saint Grégoire Palamas (XIVème siècle), déclare que le pêché et la soumission aux passions détruit l’unité des trois éléments de l’âme (intellect, désir, volonté). Il nous dit en décrivant ce dernier cas : « L’intelligence de l’homme s’éloigne de Dieu pour se tourner vers les créatures, l’intellect se disperse dans des affaires matérielles et les plaisirs variés, les passions s’étendent et envahissent tout son être les passions l’entraînent alors vers des choses insensées, l’intelligence diminue et la capacité d’aimer véritablement s’affaiblit, l’homme cherche alors la bonne nourriture, le plaisir de la chair, l’apparence, le gain matériel, il aime dépenser et accumuler de l’argent… ». L’homme ne peut s’échapper à cet état que par le retour à la maison de Dieu son père avec le repentir. Cette maison du père qu’il a abandonnée. Comme le fils qui s’est séparé de son père en faisant sa volonté propre et non celle de son père. Et rappelons-nous que notre Seigneur Jésus Christ s’est adressé à Son Père céleste en disant : « Que Ta volonté soit faite et non la mienne ». C’est la base de la croix du Christ. Ainsi la plénitude de l’amour se fait sur la croix en renonçant à sa volonté propre.
(à suivre)
Conférence de carême prononcée par Mère Marie (Zakka) dans une église de Beyrouth en 2006. Mère Marie est supérieure du monastère Saint Jean Baptiste à Douma (Liban).