Que participer à la vie de Dieu est le but de notre vie sur Terre

 

 

Le but de la vie sur cette Terre est la participation à la vie de Dieu. (Théosis en grec).

Cette « théosis » est notre participation à la propre vie de Dieu. Ceci se fait par la grâce divine qui agit lorsque nous nous purifions des convoitises et des passions : « Ceux qui sont au Christ ont crucifié la chair avec ses passions et ses désirs » (Galates 5:24). Dieu, selon saint Maxime le Confesseur, nous a fait «partenaires de la nature divine» (2 Pierre 1: 4). Le péché de l’homme contemporain est qu’il veut être autosuffisant sans relation avec son Dieu créateur, c’est ce qui constitue finalement sa vraie mort. Rappelons ici les paroles de saint Irénée : «Dieu est devenu homme pour que l’homme devienne Dieu» (avec la grâce divine incréée).

Cette pensée à laquelle s’accordent les Pères (de l’Eglise) est en opposition avec la pensée rationnelle. Le vrai défi réside dans l’expérience chrétienne qui cherche un réel renouvellement de l’homme et de l’intérieur. Bien sûr, la participation humaine à la vie de Dieu est possible pour toute l’humanité. Mais cela, par le moyen de l’ascèse du corps et de l’esprit, est étroitement lié à l’action de la grâce divine. Cela entraîne l’union de l’intellect et du cœur et à l’illumination de l’esprit et du cœur par la prière et le jeûne.

Cette communion avec Dieu, à travers la grâce divine et qui est la « théosis », préserve la suprématie absolue de Dieu, est ce que l’on désigne par la théologie apopahatique. Quand nous disons que Dieu est juste, miséricordieux, bon … Cela ne révèle pas la vraie nature de Dieu, c’est à dire Son essence, mais plutôt l’expression de ce qui entoure cette nature et les qualités positives que l’homme partage. En aucune façon cela ne touche à l’essence inconnaissable de Dieu. Participer à ce que Dieu donne est possible, mais l’essence de Dieu ou encore Sa vraie nature est au-delà de notre compréhension.

Ces explications ne peuvent pas combler la personne qui cherche Dieu de tout son cœur, c’est seulement une réflexion intellectuelle pour encourager la pratique de la vie spirituelle ascétique dans cette saison bénie de jeûne, afin que nous puissions sentir la main de Dieu dans nos vies et gouter à l’avance de la joie du Royaume.

Mgr Ephrem. Evêque de Tripoli et du Koura (Liban).

https://www.facebook.com/GreekOrthodoxArchdioceseOfTripoliKouraDependencies/posts/1628917223863373

Le Coeur du Carême

« Je serre Ta parole dans mon cœur afin de ne pas pécher contre Toi » (Psaume 119: 11)

 

Il y a des années, j’ai entendu une déclaration d’un moine américain : « Le contemplatif n’a pas besoin d’aller plus loin que son propre cœur pour trouver la source de toute violence dans le monde. » Cela m’a paru d’autant plus vrai avec le temps. À l’époque (c’était peu après la guerre du Vietnam), ce moine avait remarqué que les nombreux jeunes qui visitaient dans son monastère étaient «tellement en colère en ce qui concerne la paix». Cette déclaration faisait écho à une expérience que j’avais faite quelques années auparavant quand j’étais au début de mes études supérieures..

Un activiste de la paix bien connu, un prêtre catholique a visité notre campus. Il y a eu une discussion publique autour de sa présentation sur la guerre (Vietnam). Je me suis beaucoup impliqué dans ce qui est devenu un débat enflammé (je plaidais pour la paix). Après l’événement, le prêtre m’a dit : «Stephen, il y a plus d’une façon de faire violence à une personne.» Il avait vu mon cœur et le danger que mon cœur présentait pour moi.

Ces premières leçons ont été perdues sur moi, mais pas oubliées. Elles m’ont hanté la première fois que j’ai lu Dostoïevski. Ses romans ne présentent jamais de personnages « diaboliques ». Au lieu de cela, ils présentent la réalité du cœur humain. C’est là que la source de toute violence peut être trouvée. Discutant du thème de la beauté et de la débauche, Dimitri Karamazov examine les contradictions de nos expériences : « … le diable se débat avec Dieu, et le champ de bataille est le cœur humain. »

Lorsque le champ de bataille dans le cœur est ignoré et projeté vers l’extérieur, le résultat est un monde en noir et blanc, bon et mauvais, ami et ennemi. Mais l’ami et l’ennemi ont des cœurs qui sont eux-mêmes une masse de contradictions, un champ de bataille du bien et du mal. Soljenitsyne a vu cela :

Si seulement tout était si simple ! Si seulement il y avait des gens pervers qui se livraient insidieusement à de mauvaises actions, et qu’il était seulement nécessaire de les séparer du reste d’entre nous et de les détruire. Mais la ligne qui divise le bien et le mal traverse le cœur de tout être humain. Et qui veut détruire un morceau de son propre cœur ?

Je me rappelle chaque jour de ces premières leçons sur la violence. Si ma génération était en colère à propos de la paix, aujourd’hui nous sommes en colère contre tout. Le champ de bataille intérieur est jonché des cadavres de ceux que nous imaginons être contre nous. Aucun paroxysme de violence ne pourrait jamais purifier le monde et apporter la paix au cœur. Aucun de nos projets ne fera du monde un meilleur endroit. Le monde est la projection du cœur humain, et un peu plus.

 

C’est ce champ de bataille que le chemin de Carême vers Pâques nous demande de voir.

 

« Accorde-moi de voir mes propres fautes et de ne pas juger mon prochain »

Nous prions donc en répétant la prière de saint Ephrem. Tout ce que nous voyons (ou imaginons voir) chez ceux que nous jugeons est présent dans notre propre cœur. C’est seulement quand nous savons que c’est vrai que la repentance peut commencer et que la bataille tourne pour obtenir la faveur de Dieu.

Sans repentir, chaque manifestation publique de violence outrageante ne fait que provoquer en nous plus de violence intérieure. L’esprit logique s’empresse de réparer les erreurs et d’argumenter des solutions. Cependant la repentance produirait, je pense, le silence, et aussi la honte d’avoir eu des pensées violentes. Dans un passage sublime qui fait écho à l’enseignement qui est cœur même de l’orthodoxie, l’Ancien Zossime de Dostoïevski offre cette réflexion :

 

«Aimez-vous les uns les autres, les pères» (Zossime d’adresse aux moines)…. « Aimez les gens que Dieu a créés. Car ce n’est pas parce-que nous sommes venus ici (au monastère)  nous enfermer dans ces murs que nous sommes plus saints que ceux du monde ; mais, bien au contraire, quiconque vient ici, par le fait même qu’il est venu, se sait déjà pire que tous ceux qui sont dans le monde, pire que tous sur la Terre … Et plus un moine vit longtemps dans ces murs, plus il doit en être conscient. Car autrement il n’aurait aucune raison de venir ici. Mais quand il sait qu’il n’est pas seulement pire que tous ceux dans le monde, mais qu’il est aussi coupable devant tous, au nom de tous et pour tous, pour tous les péchés humains, du monde et de chacun, alors seulement l’objectif de notre unité (dans notre communauté monastique) est atteint. Car vous devez savoir, mes chers, que chacun de nous est indubitablement coupable au nom de tous et pour tous sur la Terre, non seulement à cause de la culpabilité commune du monde, mais personnellement, chacun d’entre nous, pour tous et pour chaque personne sur cette Terre. Cette connaissance est le couronnement du chemin du moine et du chemin de chaque homme sur Terre. Car les moines ne sont pas des hommes différents, mais c’est ainsi que tous les hommes sur Terre devraient également être. Ce n’est alors que notre cœur sera mû par un amour infini, universel et qui ne connaîtra pas la satiété. Alors chacun de nous pourra gagner le monde entier par l’amour et laver les péchés du monde avec ses larmes … Que chacun d’entre vous reste proche de son cœur, que chacun de vous se confesse inlassablement. N’ayez pas peur de votre péché, même lorsque vous le percevez, pourvu que vous vous repentiez, mais ne posez pas des conditions à Dieu. Encore une fois je le dis, ne soyez pas orgueilleux. Ne vous sentez pas supérieurs avec vos subalternes ni envers ceux qui sont au-dessus de vous. Et ne haïssez pas ceux qui vous rejettent, vous déshonorent, vous insultent et vous calomnient. Ne haïssez pas les athées, ceux qui enseignent quelque chose de mal, les matérialistes, pas même ceux d’entre eux qui sont méchants, ni ceux qui sont bons, car beaucoup d’entre eux sont bons, surtout à notre époque. Souvenez-vous-en ainsi dans vos prières : sauve Seigneur, ceux qui n’ont personne qui prie pour eux, sauve aussi ceux qui ne veulent pas prier. Et ajoutez aussitôt : ce n’est pas pour ma fierté que je prie ainsi, Seigneur, car je suis moi-même le plus vil d’entre tous … (Dans les frères Karamazov de Dostoïevski)

 

Et c’est ainsi que passe notre violence et que l’on prend le chemin de la paix.

 

Source : https://blogs.ancientfaith.com/glory2godforallthings/2018/03/02/at-the-heart-of-lent/

 

 

 

 

A propos du dimanche qui précède le début du Grand Carême

 

Source:http://www.ancientfaith.com/podcasts/hopko/forgiveness_sunday_the_expulsion_of_adam_from_paradise

Il s’agit d’une réflexion sur le début du Grand Carême par le P. Thomas Hopko (1939-2015) faite sur la radio ancientfaith.com en mars 2009.

 

Le dimanche qui précède le début du grand Carême porte deux thèmes : l’un est l’expulsion d’Adam du Paradis et l’autre thème est celui du pardon.

Sur le plan populaire dans la tradition orthodoxe, ce dimanche est appelé le dimanche du pardon. Et puis, aux vêpres du soir de ce dimanche, vous avez réellement le début de la grande saison du Carême, qui s’accompagne très souvent d’un rituel de pardon où chaque personne dans l’église se rapproche de chaque autre personne, et, s’inclinant lui demande son pardon et reçoit ainsi le pardon de l’autre.

L’expulsion d’Adam du Paradis, les hymnes de ce dimanche d’avant le Carême et le canon aux matines sont une méditation sur l’expulsion d’Adam du Paradis, et dans ces hymnes on s’identifie à Adam et à Eve. Les chants sont très souvent à la première personne : «J’étais avec toi au Paradis, j’ai péché contre toi, j’ai perdu ma beauté originelle, je suis chassé du jardin – qui en grec signifie Paradis – je suis assis ici à l’Est d’Eden, pleurant et déplorant mes péchés.  »

Cette expulsion d’Adam du Paradis est très semblable  – dans son contenu et dans son message –à  la parabole du fils prodigue, pour qui se situer  en dehors du Paradis est comme si on est  dans une porcherie, loin de la maison du père ,  dans un pays lointain, gaspillant ce que l’on a, ayant été insensé, dépensier, pécheur et se trouvant dépourvu et privé de la beauté et de la gloire de Dieu et de la maison du Père.

Cette expulsion d’Adam est également similaire à la méditation sur le Psaume 137, «A Babylone au bord des eaux», qui est chantée en cette période. Là où l’adorateur s’identifie avec les exilés, qui ne sont plus à Jérusalem, qui sont en exil, qui sont sous le contrôle des puissances mauvaises « babyloniennes », qui pleurent en se souvenant de Jérusalem, comme le fils prodigue se souvient et se lamente de la perte de la maison du père. Eh bien, en ce jour particulier, les croyants et les adorateurs de Dieu déplorent la perte du paradis.

Parmi les hymnes qui sont très nombreux, il y en a de très émouvants, très touchants dans ce qu’ils disent. Juste pour un exemple, lors des vêpres, il est chanté: « O paradis précieux, inégalé dans la beauté, tabernacle construit par Dieu, joie et délice sans fin, gloire des justes, joie des prophètes, demeure des saints, avec le son et le bruissement de tes feuilles dans les arbres du jardin, prie le maître de tous. Et qu’il ouvre pour moi les portes que j’ai fermées par ma transgression ; puisse-t-il me considérer comme digne de participer de nouveau à l’arbre de la vie et à la joie qui était la mienne quand je me suis établi en Toi depuis le commencement ».

 

Maintenant, bien sûr, nous les êtres humains ne sommes pas Adam et Eve ; nous sommes nés hors du paradis, nous sommes en quelque sorte victimes de leurs péchés et des péchés de leurs enfants devenus nos parents, nos grands-parents et nos ancêtres. Nous sommes des membres de la race humaine, nous sommes l’humanité, mais nous le savons depuis le début – et c’est l’enseignement de l’histoire de la Genèse ; il y en a deux dans la Bible. Adam et Eve depuis le commencement et l’humanité depuis le commencement ; une humanité qui a été créée pour partager la gloire de Dieu, qui a été créée pour être comme les saints Pères le disent des dieux eux-mêmes par la grâce.  A la condition d’aimer Dieu, d’ avoir  foi en Dieu, de montrer l’amour pour Dieu en gardant Ses commandements, en Lui obéissant, en Lui faisant confiance, en n’écoutant pas les pouvoirs maléfiques, en n’écoutant pas la sagesse de ce monde. Car le serpent dans l’histoire représente la sagesse terrestre, qui dans la lettre de Jacques est appelée psychique par opposition à spirituelle et démoniaque. Alors ce serpent est Satan : c’est la sagesse terrestre. C’est un choix propre, c’est sa propre volonté contre celle de Dieu, c’est écouter toutes ces voix qui ne sont pas la voix de Dieu, obéir à toutes ces paroles qui ne sont pas la parole de Dieu, et donc amener la mort sur soi-même.

L’expulsion du Paradis dans l’histoire est faite par Dieu, mais Il n’a pas le choix. Le péché lui-même – et c’est cela ce que signifie l’arbre de la connaissance du bien et du mal-  le péché signifie un acte d’apostasie, de rébellion, de folie – cet acte tue l’humanité. Dans l’histoire, le Seigneur dit : « Au jour où vous en mangerez, vous mourrez sûrement ; même si vous le touchez, vous mourrez sûrement ». Maintenant, certaines personnes disent : Eh bien, Adam et Eve l’ont mangé. Ils ne sont pas morts , mais ils l’ont fait. Ils sont morts à la minute où ils l’ont fait. Oui, ils sont devenus mortels ; ils ont vécu plus longtemps. Il est dit qu’Adam a vécu, je ne sais pas, cent ans et ainsi de suite, mais ils étaient déjà morts. Ils étaient des hommes morts vivants, comme on dit ; ils existaient mais ne vivaient plus, parce que vivre dans l’Écriture signifie louer, glorifier et obéir à Dieu.

Dans la Tradition orthodoxe, les Écritures et la Liturgie, et même dans les écrits de certains des saints – comme l’un des saints récents Silouane du Mont Athos qui est mort en 1938, il a écrit cette longue lamentation d’Adam: Oh, comme je désire le Paradis, comme je désire ma place originelle. Je peux m’en souvenir c’est dans mon esprit mais je ne l’ai pas. Et ici je suis chassé, chassé par mon propre péché, par ma propre rébellion, destiné à mourir.

Et certains des saints comme saint Jean Chrysostome ont dit que c’est une loi, une loi métaphysique ontologique, que si tu pèches, tu meurs ;et pour saint Paul, «le salaire du péché est la mort». Il y a une certaine miséricorde en cela, parce que si nous pouvions simplement pécher, pécher et encore pécher, faire le mal et la méchanceté et croître sans fin, ce serait une éternité, ce serait l’enfer, ce que certaines personnes peuvent choisir, mais le fait de mourir nous donne une chance, nous donne une chance de renaître, nous donne une chance de recommencement.

Et dans cette méditation sur le fait d’être exilé avec Adam, durant ce même service, nous chantons le psaume « Sur les bords des eaux de Babylone. » Ce n’est pas seulement pour nous rappeler notre apostasie, nous souvenir de notre rébellion, nous rappeler que nous ne sommes pas dans la maison du père, que nous ne sommes pas au paradis, que nous ne sommes pas à Jérusalem; quelque chose a terriblement mal tourné et est devenu terriblement mauvais à cause de la rébellion et du péché de l’humanité. Ce n’est pas seulement que nous devons nous en souvenir, mais nous devons aussi nous souvenir que Dieu nous pardonne, que Dieu a pitié de nous, que Dieu savait que l’humanité pécherait, Dieu sait tout. Il n’a pas créé Adam et Eve et les a mis au Paradis et a ensuite dit : « Oh Là !  Regardez, ils ont péché. Que ferons-nous ? »Et qu’ensuite Dieu le Père dise au Fils qui est le Verbe éternel : « Mon Fils, va et fais quelque chose à propos de cette humanité qui a péché. »

Dieu savait que nous pécherions avant de nous avoir faits, et il nous a fait de toute façon. Ainsi ce péché fait partie de son plan providentiel pour notre salut. Nous devons passer par là ; nous devons l’expérimenter. Comme une mystique anglaise nommée Julian de Norwich l’a dit : « Il y a un péché. » Il ne pouvait en être autrement. Parfois, les gens demandent : «Pourquoi Dieu n’a-t-il pas créé un monde dans lequel il n’y aurait pas de péché?» Et il semble que la réponse audacieuse que nous devons faire est parce qu’il n’y a pas de monde, il n’y a pas d’êtres humains qui ne pèchent pas.

Et c’est très important de se rappeler cela parce que c’est ce qui nous permet de nous identifier à Adam dans les hymnes de l’Église. Nous ne pouvons pas dire : « Oh, je suis là parce que quelqu’un d’autre a péché ; Je n’aurai jamais agi ainsi ». Ce n’est tout simplement pas vrai ; c’est simplement la vérité que si nous étions nous-mêmes l’humanité originelle, les êtres humains originels, nous aurions aussi péché. Comment savons-nous cela ? Eh bien, les saints nous disent que nous le savons pour une raison très simple. Nous connaissons le Christ et l’Évangile et nous péchons encore. Et saint Siméon le Nouveau Théologien commentant cela a dit : « Notre péché est pire que celui d’Adam. Il était une sorte de créature terrestre primitive, tirée de la poussière, tentée par le diable, essayant d’apprendre à être un humain. Et il a péché dès le commencement, et Dieu savait qu’il le ferait. Mais regardons-nous dit-il ! »

Adam a mangé ce fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, qui symbolise simplement qu’il a péché. Il a existentiellement goûté au péché ; il l’a fait quel que soit la forme de ce « péché » – et nous ne savons pas ce qu’était le péché originel – nous savons que c’était la rébellion, nous savons que ce n’était pas la confiance en Dieu, nous savons que ce n’était pas la foi, nous savons qu’il désobéissait, mais c’est en ce sens un paradigme de tous les péchés. Une chose que nous savons à coup sûr, ce n’était pas un acte sexuel. Ce n’était pas le fait qu’Adam et Ève aient eu des relations sexuelles ou quelque chose dans le genre ; ce n’est absolument pas l’enseignement de l’Eglise. Ils ont reçu le commandement de croître et de se multiplier au paradis. Mais nous n’avons aucune trace de cela, en fait, nous n’avons aucune trace d’une vie qui ne soit pas tombée du tout dans l’histoire de la Genèse et des récits de la Genèse, rien du tout. Nous ne savons rien d’Adam et Ève « vivant avant qu’ils aient péché ». Nous pourrions savoir qu’ils ont été créés pour une vie glorieuse totalement belle avec Dieu au Paradis, et que leur tâche était même de répandre le Paradis dans tout le chaos en dehors de l’Eden.

Certains Pères pensent même que c’est la vocation de l’humanité de montrer la présence et le Paradis de Dieu dans le chaos où ils sont absents. Parce qu’il y avait un Paradis extérieur, et le Paradis dans l’histoire est un petit endroit, et Adam et Ève étaient censés augmenter et multiplier et développer et diviniser la création. Mais ils ne l’ont pas fait. Ils sont tombés, ils se sont rebellés et se sont retrouvés chassés en pleurant. Mais nous savons que si nous étions avec eux, nous aurions fait de même, parce que nous péchons de toute façon. Saint Siméon dit : « Ils ont mangé de cet arbre de la connaissance du bien et du mal, mais nous mangeons du corps et du sang du Christ à la sainte Eucharistie. » Et il ajoute : « Quand le corps et le sang du Christ sont encore dans notre bouche, nous quittons l’église et nous péchons. C’est comme le peuple d’Israël, qui a été conduit hors d’Egypte et nourri par la manne, et tandis que la manne de Dieu était dans leurs bouches, ils ont blasphémé et adoré les idoles et ont fait la méchanceté. Donc, aucun être humain n’échappe au péché ; aucun être humain ne peut blâmer quelqu’un d’autre. Chacun de nous se tient en lui-même. Cependant il est vrai que nous ne sommes pas Adam et Eve et nous sommes déjà, comme il est dit dans les psaumes, «conçus dans les iniquités ; dans le péché, notre mère nous a conçus » ; non pas que l’acte de conception soit un péché, mais que nous sommes nés dans un monde déjà brisé, déjà apostasié, déjà rebelle.

Si vous ajoutez les autres symboles de la période (du Grand Carême), vous pourriez dire : nous sommes nés à Babylone ; nous ne sommes pas nés à Jérusalem. Nous sommes nés dans la porcherie ; nous ne sommes pas nés dans la maison du père. Nous devons être ramenés à Jérusalem, ramenés à la maison du père, ramenés au paradis. Et nous croyons que c’est ce que Jésus a fait pour nous, et c’est ce que nous célébrons pendant le Carême et la Semaine Sainte et surtout la Sainte Pâques. Nous célébrons le fait que Dieu a envoyé son fils pour être le vrai dernier Adam final qui ne pèche pas. Nous célébrons le fait qu’il nous a cherchés et nous a trouvés : dans le parc à cochons, dans la campagne lointaine, en dehors du paradis. Et il nous pardonne et il nous lave et il nous purifie et il nous rafraîchit et nous renouvelle et nous restaure et nous ressuscite des morts et nous ramène à la maison du père, nous ramène à la Jérusalem céleste, nous ramène à la maison au paradis.

Ainsi, durant le Grand Carême, nous commençons toute cette période en nous souvenant de notre exil, en nous souvenant qui nous sommes et ce que nous sommes et comment nous sommes, maudits, pécheurs, morts par nous-mêmes, en tant que race humaine, en tant qu’ensemble et en tant qu’êtres humains individuels et il n’y a personne qui vit qui ne pèche pas, il n’y a personne qui soit juste; personne sauf le Seigneur Jésus-Christ lui-même. Il est l’homme sans péché qui est devenu de toutes les manières ce que nous sommes. Comme il est dit dans la lettre aux Hébreux, à partir de laquelle toutes les lectures d’épître pendant le Carême seront prises, dans cette lettre aux Hébreux, il est dit : « Il est devenu semblable à ses frères en tout égards, afin que, en devenant comme nous, nous pourrions devenir comme lui. Il a été tenté comme nous le sommes afin d’être avec nous qui sommes tombés en tentation.  »

 

Donc, le dimanche, la veille même du Grand Carême, ce sont les choses dont nous nous souvenons. C’est ainsi que nous nous identifions, c’est ainsi que nous nous voyons. Mais nous nous voyons non seulement bannis, chassés, expulsés, assis en dehors de l’Eden, en pleurs, mais nous nous voyons aussi comme les objets de la miséricorde infinie de Dieu. Et Lui, sachant cela, a  depuis le commencement, sachant que le Fils de Dieu, l’éternel logos divin et la parole de Dieu, le propre fils de Dieu, l’image de Dieu ne s’accrocherait pas à sa divinité, comme l’a dit saint Paul dans la lettre aux philippiens, mais deviendrait humain, prendrait la forme d’un homme mais pas seulement, il sera  mort, maudit, suspendu à l’arbre de la croix, prenant sur lui toute la condition de l’humanité déchue pour nous rendre divins.

Nous commençons donc la grande saison de Carême en méditant sur ces choses.

http://www.ancientfaith.com/podcasts/hopko/forgiveness_sunday_the_expulsion_of_adam_from_paradise

Ne négligeons pas le jeûne…

Ne négligeons pas le jeûne : bien que délaissé [quelquefois…et même souvent] de nos jours en Occident, il a une très grande importance dans la tradition biblique. Il a une place prépondérante dans la tradition patristique : ainsi saint Isaac le Syrien (« Chacun sait une chose, c’est que toute lutte contre le péché et le mal commence par le travail du jeûne », « Quiconque méprise le jeûne sera faible, sans vigueur pour toute bonne œuvre, car il lui manque l’arme avec laquelle tous les athlètes divins ont obtenus la victoire »). De même saint Jean Climaque et tous nos pères dans la foi, jusqu’aux nombreux spirituels de notre Église orthodoxe contemporaine comme l’ hiéromoine Émilianos : « Le jeûne est une tradition de notre Église. Si nous ne jeûnons pas nous ne sommes pas chrétiens. Par quel moyen le prophète Élie est-il monté aux Cieux ? Quand Moïse a-t-il vu Dieu ? Comment l’apôtre Paul a-t-il reçu l’appel divin ? Et Barnabé ? Tous jeûnaient. À quel moment Pierre vit-il la nappe descendre de la Jérusalem céleste ? Lorsqu’il jeûnait. Donc, nous aussi, observons ce qui nous est transmis par la tradition de notre Église » (« Catéchèses et discours »).

Et encore : « L’Église orthodoxe est très profondément ascétique, et ceux qui n’aiment pas l’ascèse et sont amis de la mollesse et du confort n’ont pas de place en elle ! » (Épiphane, Géronda d’Athènes). Parole un peu sévère, mais bien équilibrée par la suivante : « Ne vous faite pas violence avec orgueil pour pratiquer l’ascèse au-delà de vos forces, car vous en retireriez de l’angoisse. Le Christ est, non pas un tyran, mais un père plein de tendresse, et Il se réjouit du combat que nous menons avec zèle. » « Si nous ne pouvons pas mener une grande ascèse ou si même nous ne pouvons accomplir aucune pratique ascétique, du moins reconnaissons-le humblement et demandons à Dieu de nous faire miséricorde. Si cet humble aveu ne nous aidait pas, le Christ ne nous le demanderait pas » (« Fleurs du Jardin de la Mère de Dieu » du moine athonite Païssios).

Source : https://www.sagesse-orthodoxe.fr/jaimerais-savoir/foi-et-tradition-orthodoxe/histoire-et-organisation-de-leglise/le-jeune

Sur la vigilance

La Vigilance

La sainteté n’est donnée qu’à ceux qui exercent la vigilance.

Pas une heure ne doit passer sans que nous prenions le temps d’examiner notre cœur, car l’heure du jugement peut venir à tout moment, et nous devons être prêts à rendre compte à Dieu de notre vie. Dans l’Évangile de Matthieu (5: 8), nous lisons : «Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu». Il est clair que sans un cœur humble et contrit nous ne pourrons pas voir Dieu.

Saint Isaac le Syrien nous dit : « Personne ne peut comprendre s’il n’est pas humble, et celui qui manque d’humilité manque de compréhension. » La prescription qui nous est donnée par tous les Saints Pères indique que l’examen des pensées et la vigilance sont la voie pour atteindre la pureté du cœur, car l’orgueilleux qui n’a pas extirpé la maladie qui est dans son cœur, sera incapable de plaire à Dieu.  Seule la sainteté de la vie ouvre les portes du Paradis qui nous attend.

Aucune amélioration spirituelle ne peut être réalisée si nous ne cherchons pas à plaire à Dieu par la sainteté de vie, et pourtant tout ce que nous faisons de bien doit être attribué à Dieu. « Il n’y en a aucun qui fasse le bien, non pas un seul (Romains 3:12) », et aussi « Car il n’y a pas un homme juste sur la terre, qui fasse le bien, et qui ne pèche pas (Ecclésiaste 7:20) ».

Si nous trouvons que nous avons négligé notre lutte spirituelle, et agi avec un abandon insensé, nous devons, dans notre faiblesse, nous tourner vers Dieu dans la repentance, et cela ne peut arriver qu’avec un examen à toute heure de notre cœur. Nous devons nous résoudre à revenir à nous-mêmes, et avec l’aide de Dieu, combattre l’ennemi de nos âmes, car la sainteté ne vient que pour ceux qui luttent.

Avec l’amour en Christ,   Abbé Tryphon

Source : https://www.facebook.com/Abbot-Tryphon-1395030584153681/