Les Saints Pères: sur la maladie (3)

  1. Le but de la maladie.

 L’Esprit Saint lui-même témoigne à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu.  Et puisque nous sommes enfants, nous sommes aussi héritiers : héritiers de Dieu, et donc cohéritiers de Christ, puisque nous souffrons avec lui pour avoir part à sa gloire. (Romains 8 :16-17)

Notre Sauveur et les Pères porteurs de Dieu (les Pères théophores) enseignent que notre seule préoccupation dans cette vie devrait être le salut de nos âmes. L’évêque Ignace (Brianchaninov) dit : «La vie terrestre – cette brève période – est donnée à l’homme par la miséricorde du Créateur afin que l’homme puisse l’utiliser pour son salut, c’est-à-dire pour sa restauration de lui-même de la mort à la vie» (L’arène). Par conséquent, nous devons «regarder tout dans ce monde comme une ombre évanescente et n’attacher notre cœur à rien (qui appartienne à ce monde) … « parce que nous regardons, non point aux choses visibles, mais à celles qui sont invisibles ; car les choses visibles sont passagères, et les invisibles sont éternelles.»(Saint Jean de Kronstadt, conseils spirituels citant 2 Corinthiens 4 :18). Pour les chrétiens orthodoxes, le centre de notre vie n’est pas ici, mais là, dans le monde éternel.

Combien de temps nous allons vivre, quelle maladie ou infirmité va accompagner notre mort – ces choses ne sont pas la préoccupation propre des chrétiens orthodoxes. Bien que nous chantions «plusieurs années» l’un pour l’autre aux jours des fêtes et autres célébrations, ce n’est que parce que l’Église dans sa sagesse sait que nous avons vraiment besoin de «plusieurs années» pour nous repentir de nos péchés et être convertis, et non pas parce qu’une longue vie  a une valeur en soi. Dieu ne va s’intéresser pas à notre âge nous quand nous allons nous présenter devant son jugement, mais si nous nous sommes repentis ; Il ne s’intéresse pas tant de savoir si nous sommes morts d’une crise cardiaque ou d’un cancer mais si notre âme est en bon état de santé.

Par conséquent, « nous ne devons pas redouter les maladies à l’exception du péché, ni la pauvreté, ni les infirmités, ni l’insulte, ni le traitement malveillant, ni l’humiliation, ni la mort » (saint Jean Chrysostome, Sur les Statues) car ces « maux » ne sont que des mots ; Ils n’ont aucune réalité pour ceux qui vivent pour le Royaume des Cieux. La seule vraie « calamité » dans cette vie est de déplaire à Dieu. Si nous avons cette compréhension fondamentale du but de la vie, la signification spirituelle de l’infirmité corporelle peut être ouverte pour nous.

Dans le chapitre précédent, nous avons appris comment le Dieu tout-sage a permis à la souffrance d’entrer dans le monde afin de nous montrer que nous ne sommes que des créatures. C’est une leçon encore pas apprise par la race d’Adam qui, dans sa fierté, a toujours cherché à être comme «des dieux» : car chaque péché est un renouvellement du péché des premiers ancêtres, un détournement volontaire de Dieu vers soi. De cette façon, nous prenons la place de Dieu, en nous adorant nous-mêmes au lieu du Créateur. Ainsi, la souffrance de la maladie a le même but aujourd’hui qu’elle l’avait au début : pour cette raison, c’est un signe de la miséricorde et de l’amour de Dieu. Comme le disent les saints Pères à ceux qui sont malades : «Dieu ne vous a pas oublié, il prend soin de vous» (Sts. Barsanuphe et Jean de Gaza, VIème siècle, Philocalie).

Cependant il est difficile de voir comment la maladie peut être un signe du soin que Dieu nous fait si nous ne comprenons pas la relation qui existe entre le corps et l’âme. L’Ancien Ambroise du monastère d’Optina (XIXème siècle) en a parlé dans une lettre à la mère d’un enfant très malade :

« Nous ne devons pas oublier que, à notre époque de« sophistication », même les petits enfants sont spirituellement blessés par ce qu’ils voient et entendent. En conséquence, une purification est nécessaire, et cela ne se fait que par des souffrances corporelles … Vous devez comprendre que le bonheur du Paradis n’est accordé à personne sans souffrance. « 

Saint Nicodème de la Montagne Sainte (XVIIIème siècle) a expliqué que, puisque l’homme est double, composé de corps et d’âme, «il y a une interaction entre l’âme et le corps» (Conseils), chacun influençant l’autre et communiquant réellement avec l’autre. « Lorsque l’âme est malade, nous ne ressentons généralement aucune douleur », dit saint Jean Chrysostome. « Mais si le corps ne souffre qu’un peu, nous faisons tous les efforts pour être libres de la maladie et de la douleur. Par conséquent, Dieu corrige le corps pour les péchés de l’âme, de sorte que, en châtiant le corps, l’âme puisse aussi recevoir une certaine guérison »  … Le Christ a fait cela avec le Paralytique quand il lui dit : « Voici, tu as été guéri ; ne pèche plus de peur qu’il ne t’arrive quelque-chose de pire ». Qu’est-ce que cela nous apprend ? Que la maladie du paralytique avait été produite par ses péchés (Homélie 38, Sur l’Evangile de Saint-Jean).

Une fois, une femme fut amenée à saint Séraphim de Sarov. Elle était gravement paralysée et ne pouvait pas marcher parce que ses genoux étaient pliés vers sa poitrine. Elle a dit à l’Ancien qu’elle était née dans l’Église orthodoxe mais, après avoir épousé une personne hostile à l’Eglise, elle avait abandonné l’Orthodoxie et, à cause de son infidélité, Dieu l’avait puni … Elle ne pouvait pas que difficilement bouger la main ou son pied. St. Seraphim demanda à la malade si elle avait foi maintenant en sa Mère, notre Sainte Église orthodoxe. En recevant une réponse affirmative, il lui a dit de faire le signe de la Croix de la manière appropriée. Elle a dit qu’elle ne pouvait même pas lever la main Mais quand le Saint a prié et a oint ses mains et sa poitrine avec de l’huile de la lampe qui éclaire l’icône, sa maladie l’a laissée instantanément. Il lui a dit : voilà ; maintenant tu es rétablie dans ton intégrité. Ne pèche plus, afin que   pire chose ne vienne à toi !

Ce lien entre le corps et l’âme, le péché et la maladie, est clair : la douleur nous dit que quelque chose a mal tourné pour l’âme, que non seulement le corps est malade, mais aussi l’âme. Et c’est précisément comment l’âme communique ses maux au corps, éveillant un homme à la connaissance de soi et au désir de se tourner vers Dieu. Nous voyons cela encore dans la vie des saints, car la maladie enseigne également que « notre vrai soi, ce qui constitue essentiellement l’homme, n’est pas le corps visible, mais l’âme invisible, l’homme intérieur» (saint Nicodème de la montagne sainte, la morale chrétienne).

Mais cela signifie-t-il que l’homme qui jouit d’une bonne santé en continu est en «bonne forme» spirituellement ? Pas du tout, car la souffrance prend de nombreuses formes, qu’il s’agisse du corps ou de l’esprit et de l’âme. Combien de gens en bonne santé se plaignent que la vie ne vaut pas la peine d’être vécue ? Saint Jean Chrysostome décrit ce genre de souffrance :

« Certains pensent que profiter d’une bonne santé est une source de plaisir. Mais ce n’est pas toujours le cas. Car beaucoup de personnes qui sont en bonne santé, ont mille fois souhaité de mourir, ne pouvant supporter les insultes qui leur étaient infligées … Car même si nous devenons des rois, nous devrons rencontrer beaucoup d’ennui et de tristesse … Par nécessité, les rois ont autant de tristesse qu’il n’y a de vagues sur l’océan. Donc, si devenir roi ne peut rendre la vie libre de tout chagrin, alors quoi d’autres pour atteindre cet objectif ? Il n’y a rien d’autre en effet, dans cette vie « (Homélie I8, Sur les Statues).

Plusieurs églises protestantes réclament souvent «la santé» au «Nom du Christ». Elles considèrent la santé comme quelque chose dont le chrétien a naturellement le droit. De leur point de vue, la maladie trahit un manque de foi. C’est exactement le contraire de l’enseignement orthodoxe comme l’illustre la vie du Job le juste dans l’Ancien Testament. Saint Jean Chrysostome dit que les saints servent Dieu non pas parce qu’ils s’attendent à une sorte de récompense spirituelle ou matérielle, mais simplement parce qu’ils l’aiment : «pour les saints, sachez que la plus grande récompense de tous est de pouvoir aimer et servir Dieu ». Ainsi, « Dieu, voulant montrer que ce n’était pas pour une récompense que ses saints le servaient, a dépouillé Job de toutes ses richesses, l’a livré à la pauvreté et lui a permis de tomber dans des maladies terribles ». Et Job, qui ne vivait pour aucune récompense dans cette vie, restait fidèle à Dieu (Homélie I, Sur les Statues).

 

De même que les personnes en bonne santé ne sont pas sans péché, Dieu aussi permet parfois aux personnes vraiment justes de souffrir, « pour devenir un modèle pour les faibles » (Saint-Basile, le Grand, Les grandes règles). Car, comme l’enseigne saint Jean-Cassien, «un homme est davantage instruit et formé par l’exemple d’un autre» (Conférences).

C’est ce que nous voyons dans le cas du pauvre Lazare de l’Evangile. « Bien qu’il ait souffert de blessures douloureuses, il n’a jamais murmuré contre l’homme riche ni lui a demandé quoique ce soit … En conséquence, il a trouvé le repos dans le sein d’Abraham, comme celui qui a accepté humblement les malheurs de la vie » (Saint Basile le Grand, Les grandes règles).

Les Pères de l’Église enseignent également que la maladie est un moyen par lequel les chrétiens peuvent imiter la souffrance des martyrs. Ainsi, dans la vie de beaucoup de saints, on constate qu’ils ont eu des souffrances corporelles intenses vers la fin de leur vie, de sorte que par leur juste souffrance ils puissent égaler le martyre physique. Un bon exemple peut être trouvé dans la vie de ce grand champion de l’orthodoxie, saint Marc d’Éphèse :

« Il était malade durant quatorze jours, et la maladie, comme il l’a dit lui-même, avait sur lui le même effet que les instruments de torture appliqués par les bourreaux aux saints martyrs. Cette douleur a ceinturé ses côtes et ses organes internes et ils étaient tellement comprimés entraînant une souffrance absolument insupportable. Ainsi ce que les hommes n’auraient pas pu faire à son corps sacré et martyrisé était fait par la maladie. Selon le jugement indescriptible de la Providence, et afin que ce Confesseur de la Vérité et Martyr, Victorieux de toutes les souffrances possibles, apparaisse devant Dieu après avoir traversé toute sorte de misère, et cela jusqu’à son dernier souffle, comme l’or qui est éprouvé dans la fournaise, et que grâce à cela, il puisse recevoir pour l’éternité encore plus d’honneur et de récompenses de la part du Juste Juge. » (The Orthodox Word, vol. 3, numéro 3).

Vous qui croyez être bien, veillez à ne pas tomber loin de Dieu au temps du malheur. – St. Jean de Kronstadt.

Source : Source : http://fatheralexander.org/booklets/english/fathers_illness.htm

 

 

Les Saints Pères : sur la maladie (2)

‏L’origine et la cause de la souffrance.

 

Or, nous savons que, jusqu’à ce jour, la création toute entière soupire et souffre les douleurs de l’enfantement. (Romains 8:22)

Mais étroite est la porte, resserré le chemin qui mènent à la vie, et il y en a peu qui les trouvent. (Matthieu 7:14).

Cela est spécifié à la fois par le saint exemple de notre Seigneur et par son saint enseignement. Le Seigneur a prédit à ses disciples et à ceux qui le suivraient que dans le monde, c’est-à-dire pendant leur vie terrestre, ils auront des tribulations (Jean 16:33; 15:18; 16: 2-3) … De là, il est clair que le chagrin et la souffrance sont précisément désignés par le Seigneur lui-même pour ses vrais serviteurs durant leur vie sur terre « (Évêque Ignace Brianchaninov, L’Arène).

Mais pourquoi en est-il ainsi ? Pourquoi les «chagrins et les souffrances», ainsi que les maux qui vont avec, nous sont effectivement affectés ? L’enseignement des saints Pères montre comment la souffrance doit être comprise dans le contexte de l’état premier créé par l’homme et sa chute ultérieure dans le péché.

Au début, il n’y avait pas de douleur, pas de souffrance, ni maladie ni mort. L’homme était «étranger au péché, aux peines, aux soucis et aux nécessités difficiles» (St. Symeon, le nouveau théologien, Homélie 45).

Si Adam et Eve n’avaient pas transgressé, «ils auraient progressivement acquis la gloire la plus parfaite et, en changeant, se seraient rapprochés de Dieu … et la joie et la réjouissance avec lesquelles nous aurions été remplis par la communion ente humains, véritablement cela aurait été quelque-chose d’indicible bien au-delà de notre structure de pensée (actuelle) « (Ibid.). Comme il n’y aurait pas eu de souffrance, il n’y aurait pas eu de maladie et, par conséquent, il n’y aurait pas eu besoin de la médecine.

« Mais quand l’homme a été trompé et séduit par le diable … Dieu est venu à l’homme comme le médecin qui vient chez un homme malade » (Saint Jean Chrysostome, Homélie 7, Sur les Statues). Dieu est descendu au Paradis dans la fraicheur de la journée et a appelé, Adam, où es-tu ? (Genèse 3: 9). Sa première manifestation à l’homme après le péché de la désobéissance n’était pas celui d’un juge vengeur, « car Dieu, quand il trouve un pécheur, ne considère pas comment il peut lui faire payer la sanction, mais comment il peut l’amender et le rendre meilleur » (St. Jean Chrysostome, Ibid.).

L’homme, la créature, avait succombé à la tentation d’être comme Dieu, le Créateur ; chose qui est contre toute raison ou possibilité. Ceci, le premier péché, a amené avec lui non pas «la divinité», mais la douleur, la maladie et la mort – et non par «hasard», mais pour une raison corrective spécifique : afin que l’homme puisse le savoir sans aucun doute et pour tout le temps qu’il n’est pas « comme Dieu ».

Par conséquent, le Médecin céleste « a rendu le corps [de l’homme] soumis à beaucoup de souffrances et de maladies, afin que l’homme puisse apprendre de sa nature même qu’il ne doit plus jamais entretenir la pensée « qu’il pourrait être comme Dieu » (saint Jean Chrysostome, Homélie 11, Sur les Statues). Dieu a dit à Eve :   « dans la douleur, tu enfanteras » (Genèse 3:16) ; et à Adam : « la terre sera maudite à cause de toi. C’est à la sueur de ton visage que tu mangeras du pain, jusqu’à ce que tu retournes dans la terre, d’où tu as été pris ; car tu es poussière, et tu retourneras dans la poussière » (Genèse 3:17, 19).

Il est extrêmement important de comprendre cela dès le début, car si nous ne comprenons pas cette vérité sur la nature de l’homme déchu, rien de ce que les saints Pères enseignent sur ce sujet n’aura du sens. D’autre part, « si nous pouvons comprendre cela, nous pourrons apprendre de nous-mêmes et nous pourrons connaître Dieu et l’adorer en tant que Créateur » (Saint Basile le Grand, Hexameron). « Le péché engendre le mal, et le mal engendre la souffrance », écrit le Professeur Andreyev; « pourtant, cette souffrance même, qui a son origine en Adam et Eve, est une bénédiction pour nous tous, car cela nous oblige à réaliser combien est dangereuse pour nos âmes et nos corps  notre infidélité envers Dieu » (Orthodox Christian Apologetics).

(A suivre)

Source : http://fatheralexander.org/booklets/english/fathers_illness.htm

Les Saints Pères : sur la maladie (1)

Introduction.

 

Chacun d’entre nous qu’il soit chrétien ou non doit s’attendre à la maladie ou aux inconvenances dans sa vie. La douleur physique est universelle ; personne ne peut en échapper. Par conséquent, combien nous souffrons de la maladie et avec quelle intensité ne compte pas autant que notre compréhension de ces infirmités. La compréhension est ce qui compte.

Pour celui qui suppose que la vie devrait être semblable à des vacances longues et confortables alors toute souffrance qui lui survient est insupportable. Mais si un homme considère la vie comme un temps de peines, de correction et de purification, la souffrance et la douleur deviennent non seulement supportables, mais aussi utiles.

Saint Ambroise de Milan dit de l’attitude chrétienne à l’égard de la maladie : «Si l’occasion l’exige, un sage acceptera volontiers l’infirmité corporelle et même offrira tout son corps jusqu’à la mort pour l’amour du Christ … Ce même homme n’est pas affecté en esprit ou brisé par les douleurs corporelles si sa santé décline. Il est consolé par sa lutte pour la perfection dans les vertus. En entendant cela, l’homme qui raisonne suivant ce monde est susceptible de s’exclamer et de dire en criant : «mais quelle idée ! Comment quelqu’un peut-il accepter facilement la maladie et la souffrance ? »

Pour un incroyant, cela est en effet incompréhensible. Il ne peut pas concilier le fait de la souffrance humaine avec sa propre idée de Dieu. Pour lui, la pensée même que Dieu puisse permettre la douleur est répugnante ; habituellement, il considère toute forme de souffrance comme un mal dans un sens absolu.

Sans l’aide de la Révélation Divine, l’homme ne peut comprendre l’origine et la cause de la douleur, ni son but. Beaucoup de gens, n’étant pas aidés à comprendre, sont hantés par la peur de la douleur, terrifiés à la pensée d’une maladie persistante, et cherchent au plus vite un remède médical parce qu’ils pensent que la maladie n’est que le résultat du «hasard».

S’il est vrai que l’infirmité vient à travers une «mauvaise chance» (cependant même le bon sens nous dit que ce n’est pas tout à fait ainsi, car beaucoup de maladies sont le résultat d’une vie immodérée), alors il est permis et même souhaitable d’utiliser tous les moyens pour éviter la douleur de la maladie et même la maladie elle-même. En outre, lorsqu’une maladie devient irréversible et terminale, la sagesse de ce monde enseigne qu’il est acceptable de mettre fin à la vie du patient – ce que l’on appelle l’euthanasie, ou «mort miséricordieuse» – puisque, selon ce point de vue, la souffrance sur le lit de mort est inutile et cruelle, et donc c’est un mal.

Mais même dans la vie quotidienne, nous savons que la souffrance n’est vraiment pas «un mal absolu». Par exemple, nous nous soumettons au bistouri du chirurgien pour avoir une partie malade du corps amputée ; la douleur de l’opération est grande, mais nous savons qu’elle est nécessaire pour préserver la santé ou même la vie. Ainsi, même à un niveau strictement matérialiste, la douleur peut servir un bien supérieur.

Une autre raison pour laquelle la souffrance humaine est un mystère pour un incroyant est que sa conception même de Dieu est fausse. Il est choqué quand les saints Pères parlent de Dieu de la manière suivante : «Si Dieu nous envoie une famine, ou une guerre ou toute autre calamité, Il le fait à cause de Sa grande bienveillance et Sa bonté» (saint Jean Chrysostome , Homélie 7, Sur les Statues).

Le saint théophore Macaire d’Optina, dans la Russie du XIXe siècle, a écrit à un ami : «Ayant une santé faible comme vous, je ne peux pas manquer d’avoir beaucoup de compassion pour votre situation. Mais la bonne Providence n’est pas seulement plus sage que nous, Elle est également sage d’une manière différente. C’est cette pensée qui doit nous soutenir dans toutes nos épreuves, car elle nous console comme aucune autre pensée ».

« Sage d’une manière différente » … Ici, nous pouvons commencer à voir que la façon de comprendre des Pères des voies de Dieu est contraire à la vision selon le monde. En fait, cette façon dont les Pères comprennent est unique : elle n’est pas spéculative, savante ou « universitaire ». Comme l’évêque Théophane le Reclus l’affirme : «La foi chrétienne n’est pas un système doctrinal, mais un moyen de restauration pour l’homme déchu». (Un moyen de guérison spirituelle). Par conséquent, le critère de la foi – de la vraie connaissance de Dieu – n’est pas un critère intellectuel. La mesure de la vérité, comme le professeur Andreyev le souligne, «est la Vie elle-même … Christ l’a dit clairement et définitivement : Je suis le chemin, la vérité et la vie (Jean 14: 6). C’est-à-dire que je suis le moyen de percevoir la Vérité : je suis moi-même la Vérité incarnée (tout ce que je dis est vrai) … et je suis la Vie (sans moi, il n’y a pas de vie) « (Orthodox Christian Apologetics). Ceci est très loin de la sagesse de ce monde.

Nous pouvons croire ou ne pas croire aux paroles du Christ sur Lui-même. Si nous croyons, et que nous agissions en conformité avec notre foi, nous pouvons alors commencer à monter sur l’échelle de la connaissance vivante comme aucun manuel ou aucun philosophe ne peut jamais donner : Où est le sage ? Où est le scribe ? Où est le disputeur de ce siècle ? Dieu n’a-t-il pas choisi les choses folles pour rendre confuse la sagesse de ce monde ? (I Cor. 1:20)

 

L’une des difficultés dans la compilation d’un manuel d’enseignement des Pères sur la maladie est que la maladie ne peut être strictement séparée de la question générale de la douleur (par exemple, la douleur psychologique et les souffrances résultant de la guerre, de la famine, etc.). Une partie de ce que les saints Pères ont à dire ici sur la maladie établit également une base pour leur enseignement sur l’adversité (….).

Une autre difficulté est que les Pères orthodoxes utilisent parfois des mots tels que «péché», «punition» et «récompense» sans se restreindre aux significations que leur donne notre société moderne. Par exemple, le «péché» est une transgression de la loi divine. Mais dans la pensée patristique, c’est aussi plus que cela : c’est un acte de «trahison», une infidélité envers l’amour de Dieu pour l’homme et une «violation arbitraire de l’union sacrée [de l’homme] avec Dieu» (Andreyev, Ibid.). Le péché n’est pas quelque chose que nous devrions voir dans un cadre juridique strict de «crime et punition» ; l’infidélité de l’homme est une condition universelle, non limitée à telle ou telle transgression. C’est quelque-chose en nous, car tous ont péché, et sont privés de la gloire de Dieu (Romains 3:23).

 

Les relations de Dieu avec l’homme ne se limitent pas à nos idées juridiques sur la récompense et la punition. Le salut, qui est le but ultime de la vie chrétienne, n’est pas une «récompense», mais un don librement donné par Dieu. Nous ne pouvons pas «gagner» ou «le mériter» par tout ce que nous faisons, peu importe la façon pieuse ou  de ne pas se mettre en avant que nous croyons réaliser.

 

Dans la vie quotidienne, nous pensons naturellement que les bonnes actions devraient être récompensées et que les crimes doivent être sanctionnés. Mais notre Dieu ne « punit » pas sur la base des normes humaines. Il nous corrige et nous châtie, tout comme un père aimant corrige ses enfants égarés afin de leur montrer le chemin. Mais ce n’est pas la même chose que d’être «condamné» à une «sentence» de douleur et de souffrance pour certains méfaits. Notre Dieu n’est pas vindicatif ; Il est en tout temps parfaitement aimant, et sa justice n’a rien à voir avec les normes juridiques humaines.

 

Il sait que nous ne pouvons pas venir à Lui sans pureté de cœur, et il sait aussi que nous ne pouvons pas acquérir cette pureté, à moins que nous ne soyons libres de toutes choses: libres d’attachements à l’argent et à la propriété, libres des passions et du péché, et même détachés de la santé corporelle si cela constitue un obstacle entre nous et la vraie liberté devant Dieu. Il nous instruit, par la Révélation et la correction, en nous montrant comment nous pouvons acquérir cette liberté, car vous connaîtrez la vérité, et la vérité vous rendra libre (Jean 8:32). Ainsi que l’enseigne saint Jean Cassien : Dieu « vous conduit pas à pas en vous élevant à cet amour où la peur est absente. Grâce à cela, vous commencez sans effort et naturellement à observer toutes ces choses que vous avez initialement observées par peur de Dieu et des sanctions, mais maintenant vous ne les faites plus par crainte du châtiment, mais pour l’amour de la bonté elle-même et de la joie dans la vertu « (Conférences de saint Jean Cassien).

Gardant à l’esprit le sens spirituel plus profond des mots tels que «péché», «récompense» et «châtiment», nous pouvons étudier les discours divinement sages des saints Pères sur le sujet de la maladie en remerciant Dieu que «notre Foi a été rendue sûre par les Saints sages et savants « (St. Cosmas d’Etolie (XVIIIème siècle ), car« vraiment, se connaître soi-même est ce qu’il y a de plus dur parmi tout », comme l’écrit saint Basile le Grand. Les saints pères indiquent le chemin. Leurs vies et leurs écrits agissent, en quelque sorte, comme un miroir dans lequel nous pouvons prendre la mesure de nous-mêmes, lourdement chargés que nous sommes par les passions et les infirmités. La maladie est l’une des façons dont nous pouvons apprendre ce que nous sommes réellement.                 (A suivre)

 

Source : http://fatheralexander.org/booklets/english/fathers_illness.htm

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La vigilance

La vigilance

La vigilance est le chemin vers la pureté du cœur

Pas une heure ne devrait passer sans prendre le temps d’examiner notre cœur, car l’heure du jugement peut venir à tout moment, et nous devons être prêts à rendre compte à Dieu pour notre vie. Dans l’Evangile de Matthieu (5: 8), nous lisons : « Heureux les cœurs purs car ils verront Dieu ». Il est clair que sans un cœur humble et contrit, nous ne verrons pas Dieu.

Saint Isaac de Syrie nous dit : «Personne ne comprend si il n’est pas humble, et celui qui manque d’humilité manque de compréhension». La prescription qui nous est donnée par tous les Saints Pères indique que le discernement et la vigilance sont le chemin vers la pureté du cœur, et que quelqu’un d’orgueilleux qui n’a pas déraciné la maladie qui est enfouie dans son cœur ne peut être agréable à Dieu, car seule la sainteté de la vie ouvre les portes du Paradis qui nous attend.

Aucune amélioration spirituelle ne peut être faite si nous ne cherchons pas à être agréables à Dieu avec la sainteté de vie, de même tout bien dans nos actes doit être attribué à Dieu. « Il n’y a personne qui fasse le bien, pas un seul (Romains 3:12) », et encore : « Car il n’y a pas un homme juste sur la terre qui fait le bien et ne pèche jamais (Ecclésiaste 7:20) ».

Si nous trouvons que nous avons négligé notre lutte spirituelle, et que de façon insensée nous l’avons abandonnée, alors dans notre faiblesse, nous devons nous tourner vers Dieu dans la repentance, et cela ne peut se produire qu’avec un examen du cœur à toute heure. Nous devons nous décider à nous examiner en profondeur, avec l’aide de Dieu, et à lutter contre l’ennemi de nos âmes, car la sainteté est accordée seulement à ceux qui luttent.

Avec l’amour du Christ,

Abbot Tryphon

 

https://www.facebook.com/search/top/?q=abbot%20tryphon  (post du 27 aout 2017)

 

Les Béatitudes de saint Ephrem le Syrien (4)

hortensias35. Bienheureux celui qui n’a pas été défait comme un couard, à cause de la passion de l’acédie, mais qui a trouvé une endurance parfaite par laquelle tous les saints ont reçu leur couronne.

36. Bienheureux qui en accord avec la volonté de Dieu, aime la maîtrise de soi et n’a pas été condamné par son estomac, comme recherchant les plaisirs et souillé, il sera magnifié par le Seigneur.

37. Bienheureux qui n’a pas été ivre de vin comme le prodigue, mais s’est réjoui chaque jour dans la mémoire du Seigneur en Qui les saints se réjouissent continuellement.

38. Bienheureux celui qui gère ce qu’il possède en accord avec la volonté de Dieu et n’a pas été condamné par le Sauveur comme aimant l’argent et sans compassion pour son prochain.

39. Bienheureux qui veille dans la prière et la lecture et les bonnes œuvres, il deviendra illuminé et ne s’endormira pas du sommeil de la mort.

40. Bienheureux qui est devenu un bon filet spirituel et qui a pris beaucoup d’âmes pour le Seigneur Bon, il sera grandement loué par le Seigneur.

41. Bienheureux qui est devenu un bon exemple pour son prochain et n’a pas scandalisé la conscience de ceux qui servent avec lui le Seigneur en agissant contre la Loi. Il sera loué par le Seigneur.

42. Bienheureux qui est devenu longanime et compassionné et non l’esclave des barbares que sont la colère et l’ire diabolique, il sera exalté par le Seigneur.

43. Bienheureux celui qui est exalté par l’amour, est devenu comme une cité bâtie sur une montagne : quand l’ennemi la voit, il se retire avec crainte, tremblant devant le Seigneur.

44. Bienheureux qui a brillé de la foi du Seigneur, comme une lampe radieuse posé sir son socle et a illuminé les âmes dans les ténèbres qui avaient suivi l’hérésie des gens sans foi et des impies.

45. Bienheureux qui aime continuellement la vérité et n’a pas prêté ses lèvres comme instrument à l’impiété pour mentir, à cause du commandement sur les paroles vaines.

46.Bienheureux qui ne juge pas son prochain comme ceux qui manquent de sagesse mais qui a compris parce qu’il est spirituel et a lutté pour ôter la poutre de son œil.

47. Bienheureux celui dont le cœur a fleuri comme un palmier par la justesse de la foi et n’a pas été envahi, comme par des épines, par l’hérésie de ceux qui n’ont pas la foi et par les impies.

48. Bienheureux qui a gardé la maîtrise de ses paupières et ne s’est illusionné ni par l’intellect ni par les sens en ce qui concerne le péché de la chair qui après peu de temps fait sourdre la putréfaction.

49. Bienheureux qui a devant ses yeux le jour du départ et qui a haï l’orgueil avant que la faiblesse de notre nature n’ait été prouvée dans son pourrissement dans le tombeau.

50. Bienheureux qui considère ceux qui dorment dans leurs cercueils au tombeau et qui a rejeté tout désir nauséabond, car il s’élèvera en gloire quand la trompette céleste sonnera, éveillant tous les enfants des hommes de leur sommeil.

51. Bienheureux qui observe avec discernement spirituel le chœur des étoiles brillant avec gloire et la beauté des cieux, et se languit de contempler Celui qui fit toute chose.

52. Bienheureux qui garde à l’esprit le feu qui descendit du Sinaï et le son des trompettes et Moise se tenant là tremblant avec crainte, et qui ne néglige pas son propre salut.

53. Bienheureux qui ne place pas son espoir en l’homme mais dans le Seigneur qui reviendra avec gloire juger l’univers avec justice, car, il sera comme un arbre planté près des eaux et il ne manquera pas de produire du fruit.

54. Bienheureux celui dont la pensée a été dans la grâce comme un nuage porteur de pluie et qui arrose les âmes pour faire croître les fruits de la vie : sa louange retentira dans la vie éternelle.

55. Bienheureux sont ceux qui veillent en Dieu sans discontinuer, car ils seront protégés par Dieu au jour du Jugement : devenant fils de la chambre nuptiale ils verront l’Epoux. Mais moi, et mes semblables, oisifs et aimant les plaisirs terrestres, nous pleurerons et nous lamenterons tandis que nous verrons nos frères dans la gloire éternelle, alors que nous sommes dans les tourments.

(FIN)

 

 

 

Source : La Voie Orthodoxe N°49. Printemps 2008.