Par quoi commencer si on veut voir Dieu
L’archimandrite Aimilianos (+2019) dans une conférence intitulée «Sur l’état que Jésus confère» dit que le problème humain fondamental est que nous ne voyons pas Dieu. En fait, la plupart des gens ne peuvent pas voir Dieu, mais ne peuvent que le chercher. C’est parce que nos yeux (physiques et les yeux de nos âmes) sont terrestres, ils sont formés pour voir, penser et contempler uniquement les choses physiques et ce qui peut être déduit des choses physiquement perceptibles ou ce qui affecte directement la façon dont nous nous sentons, c’est-à-dire les réalités émotionnelles qui sont à l’œuvre en nous – bien que certaines personnes travaillent dur pour ignorer même cela.
Si cependant, nous voulons voir Dieu, par où commencer? L’archimandrite Aimilianos dit que nous devons commencer par ce que nous pouvons faire. Nous pouvons chercher; nous pouvons venir à Dieu par le désir. En d’autres termes, si vous voulez voir Dieu, vous devez avoir la volonté de voir Dieu. Je ne suis pas redondant. Il y a comme un manque, puis ce manque se confirme. Je peux vouloir devenir médecin, par exemple; mais si ma volonté de devenir médecin n’est pas plus forte que de jouer à des jeux vidéo, ou de sortir avec mes amis et si elle ne passe pas avant tout, je ne deviendrai jamais médecin. Il y a une forme de désir, et puis il y a vraiment un désir plus fort: vouloir tellement que c’est à peu près tout ce que je veux. Et donc nous pouvons dire que si vous voulez voir Dieu, vous devez vouloir voir Dieu plus que n’importe quoi d’autre.
Maintenant, je vais émettre une évidence ici, mais je devrais probablement préciser que le mot «voir» est une métaphore. L’archimandrite Aimilianos ne parle pas de vision physique, il ne parle pas non plus d’une sorte de vision intérieure ou de vision de l’âme dans notre imagination. Au contraire, en voyant Dieu, il se réfère à une connaissance et à une rencontre avec Dieu qui est si réelle que c’est comme voir. Il dit que l’on peut connaître et rencontrer Dieu avec une telle clarté et force que «voir» est le seul mot adéquat pour décrire l’expérience. Tout comme lorsque nous disons que nous savons que quelque chose est vrai, car nous l’avons vu nous-mêmes, nous l’avons testé, ressenti, essayé et expérimenté de nombreuses manières physiques, de même l’Archimandrite Aimilianos nous dit que nous pouvons rencontrer et expérimenter et connaître Dieu d’une manière qui implique tellement de certitude que cette connaissance de Dieu est plus réelle pour nous que la preuve de nos sens physiques. En fait, affirme-t-il, cette connaissance de Dieu est en effet plus réelle que le monde entier qui est perceptible à travers mes sens et ma logique, elle est plus réelle parce que le Dieu que nous pouvons connaître n’est pas seulement réel, mais Il est la source et le fondement de toute réalité. Tout ce qui est immédiatement perceptible par les sens physiques ou par la logique ou même le sentiment humain ne sont que des réalités contingentes, des réalités contingentes à l’Un, au Dieu imperceptible que nous pouvons néanmoins percevoir si nous Le cherchons.
Et pourtant, chercher Dieu n’est pas comme chercher des choses que je peux voir physiquement ou logiquement parce qu’en cherchant Dieu, nous ne pouvons pas trouver Dieu. Dieu ne peut pas être trouvé. Mais, vous allez vous demander que si Dieu ne peut pas être trouvé en Le cherchant, pourquoi le chercher? En fait, la réponse est assez simple. Dieu ne peut pas être trouvé, quelle que soit la diligence avec laquelle nous Le cherchons, Dieu ne peut pas être trouvé, mais Dieu se révèle. Mais quand Dieu se révèle, si nous ne Le cherchons pas, nous ne Le verrons pas et nous ne Le connaîtrons pas. Il y a un passage dans le prophète Jérémie (17: 6-8) dans lequel le prophète compare ceux dont le cœur n’est pas tourné vers le Seigneur à un arbuste dans le désert qui ne sait même pas quand la pluie arrive. C’est-à-dire, quand nous ne cherchons pas Dieu, quand nous ne désirons pas voir ou être touchés par Dieu, alors quand Dieu vient, quand Dieu se révèle à nous, nous ne Le voyons pas, nous ne Le percevons pas.
Et donc, si nous voulons voir Dieu, nous devons Le chercher, mais en Le cherchant, nous ne Le trouverons pas; mais plutôt, en Le cherchant, nous nous préparons à Le voir quand Il se révèlera à nous. Quelqu’un l’a expliqué une fois de cette façon: «Vous ne pouvez absolument rien faire pour que le soleil se lève, mais vous pouvez être éveillés quand il se lève
De même, nous pouvons être éveillés, nous pouvons regarder, chercher Dieu afin que lorsque Dieu se révèle, nous pouvons Le percevoir. Cependant, ce n’est pas comme si Dieu se révélait à un moment donné et qu’après il n’y aurait plus rien, comme si Dieu jouait à cache-cache avec nous. Dieu se révèle continuellement à nous, nous parle et se fait connaître à nous d’une manière qui ne peut être perçue que lorsque nous permettons à nos esprits de changer – ou en utilisant le terme biblique – lorsque nous apprenons à nous repentir. Se repentir signifie changer la manière de penser, se transformer et percevoir différemment. En d’autres termes, Dieu n’est perçu par nous que lorsque nous changeons, ou plutôt, lorsque nous nous laissons changer. Et la recherche même de Dieu nous change parce que vouloir une chose plus que tout change tout
Lorsque nous commençons à chercher Dieu, selon l’archimandrite Aimilianos, nous demandons à Dieu de satisfaire nos désirs; et quand Il ne le fait pas, nous pensons qu’Il nous ignore. Nous demandons à Dieu de réaliser nos espoirs, et nous sommes consternés parce qu’ils ne sont pas réalisés. Nous demandons à Dieu de nous faire sentir sa proximité, et Dieu semble rester loin. Dieu ne répond pas à ces prières parce que ce sont toutes, en un sens, des demandes pour rester où nous sommes sans nous transformer , des demandes pour que Dieu renforce ce que nous pensons déjà, envisageons déjà, ce que nous désirons maintenant. En fait, l’archimandrite Aimilianos va jusqu’à dire que Dieu ne répond pas à ces prières parce que nous demandons à Dieu de renforcer les choses mêmes dont Dieu, par le repentir, veut nous faire sortir.
Et donc nous vivons une sorte de tribulation, une séparation du blé de l’ivraie, une sorte de souffrance qui nous emmène à travers ce qui ressemble à un désert où Dieu est absent. Mais Dieu n’est pas absent. Dieu est aussi proche qu’Il ne l’a jamais été. Dieu est proche et nous aide à changer nos façons de penser, en nous aidant à abandonner des manières inappropriées ou immatures de penser de Dieu et de nous-mêmes, en nous aidant à abandonner des façons de connaître et de ressentir la proximité de Dieu qui reposeraient principalement sur nos sentiments les plus superficiels ou sur des événements fortuits externes qui confirment nos attentes, nos espoirs et nos désirs. Dieu nous oblige à aller plus profondément en nous-mêmes afin que nous puissions Le connaître plus profondément. Dieu enlève ce qui est familier afin que nous puissions tendre la main pour percevoir et connaître davantage Dieu tel qu’Il est et ainsi nous permettre de nous développer.
L’archimandrite Aimilianos nous donne une image utile pour comprendre comment nous commençons à voir Dieu lorsque nous Le cherchons. Il dit que nous ne commençons pas par voir le visage de Dieu ou même son dos, mais nous commençons par voir d’abord les mains de Dieu. Nous voyons les mains de Dieu tandis que Dieu nous pétrit comme de la pâte. Alors que notre recherche nous conduit vers l’Église, vers la Tradition, vers le peuple de Dieu où nous espérons trouver Dieu, nos attentes sont contrecarrées de nombreuses façons, dont la moindre n’est pas nos attentes concernant ce que nous attendons de l’Église. Au lieu de la gloire de Dieu, beaucoup de ce que nous voyons au début sont des pots d’argile, cassés, fissurés et difformes. Nous regardons l’endroit où réside la Gloire de Dieu, et une grande partie de ce que nous voyons au début est la brisure des autres: folie, égoïsme et hypocrisie – pas plus que nos propres folies égoismes ou hypocrisies, pensez-vous, si on est honnête avec soi-même. Mais encore, nous avions espéré trouver quelque chose de différent, nous avions espéré que les gens d’ici seraient différents. Et cette même déception, pour beaucoup, est le début du pétrissage.
La déception mène à la contemplation. Nous commençons à penser plus profondément, et par conséquent, nous commençons à regarder plus profondément, à chercher plus profondément, et à travers cette contemplation, nos yeux sont ajustés, nous commençons à voir les choses différemment, nous commençons, tout d’abord, à nous voir comme nous ne nous étions pas vus auparavant, et ainsi nous commençons pour la première fois à voir Dieu, nous voyons les mains de Dieu nous pousser, nous tirer et nous presser, nous pétrir, nous changer. L’archimandrite Aimilianos l’exprime ainsi :
Vous contemplez les profondeurs de votre âme pétrie par la grâce, comme la pâte est pétrie en pain. Votre âme est maintenant une masse malléable pétrie par les mains de Dieu. Vous voyez votre âme en train de travailler, passant entre Ses doigts…. Tout ce que vous voyez est sa main, comme nous le voyons dans certaines icônes, une main émergeant d’une nuée afin de bénir le saint qui se tient en dessous. Et maintenant, vous vous tenez à côté de Dieu, regardant Sa main pendant qu’elle pétrit votre âme.
Et c’est le vrai début de la vie spirituelle, d’une vie avec Dieu. La plus grande partie de notre voyage spirituel consiste à chercher, à chercher encore et à ne pas trouver grand-chose jusqu’à ce que nous commencions à voir Dieu: nous voyons la main de Dieu. Nous voyons la main de Dieu s’opposer à nous, nous secouer, nous pétrir, nous transformer en pain. Et quand nous pouvons en effet commencer à voir la main de Dieu dans tout ce à quoi nous ne nous attendons pas, dans chaque déception, dans chaque vicissitude de la vie, chaque changement inconfortable et résultat inattendu, quand nous voyons les empreintes digitales de Dieu dans tout ce qui nous rend humbles tout ce qui nous force à ne faire confiance qu’à la miséricorde de Dieu, quand nous voyons la main de Dieu ici, nous sommes maintenant, selon l’archimandrite Aimilianos, nous sommes alors en train de commencer maintenant à voir Dieu, nous commençons à voir la main de Dieu
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