Réponds-moi, mon cœur, qui es-tu ? Si tu viens du Ciel, pourquoi cherches-tu le bonheur dans la poussière ? Si tu es de la terre, alors d’où vient ton désir du Ciel ? Si tu es un roi, pourquoi portes-tu des haillons au lieu de la pourpre ? si tu es né pauvre, alors pourquoi recherches-tu une richesse que tu ne possèdes pas ? Si tu ne connais pas Dieu, alors pourquoi soudain, dans la clameur du monde, ton cœur tremble aux paroles de prière, incompréhensibles pour toi, comme la mélodie d’une vieille chanson entendue dans une enfance lointaine ? Si tu ne te souviens pas du Ciel, d’où viennent donc ces larmes brûlantes qui brûlent le cœur, des larmes d’amour inconnu, plus douces que tous les plaisirs de ce monde ? Qui a scellé dans tes profondeurs le nom mystérieux de Dieu ? Comment pourrais-tu l’oublier, comme un homme riche qui a enterré son trésor et a ensuite perdu l’endroit où il l’avait caché. Qu’est-ce que tu es? Un aigle des montagnes aux ailes brisées, ou un oiseau nouvellement éclos rampant impuissant sur le sol, que les corbeaux croassant observent depuis les branches ? Pourquoi cries-tu parfois et tu luttes dans une agonie intérieure, comme une bête piégée qui ronge le fer, désireuse de se libérer et tombant dans l’épuisement ? Étant comme un ange désincarné, tu es revêtu d’un corps mortel qui, après la mort, disparaîtra dans la tombe. Comment es-tu devenu porteur de cadavre, mon amour ? Pourquoi, voyant autour de toi les images et les fantômes de la Mort, tu chasses, comme un ennemi, la pensée de sa venue inévitable sur toi ? Pourquoi es-tu coincé dans cette vie terrestre, comme une tique dans l’oreille d’un chien ? Dieu t’ a tout donné pour ton salut, mais tu es comme un aveugle qui porte un sac plein d’or et ne sait pas ce qu’il contient… Et l’âme répond : « Je suis une étoile déchue, gardant la mémoire du Ciel, je suis l’amour du Christ ; pour moi, il est descendu sur terre. Le Seigneur, m’ayant créé comme un reflet de la lumière divine, m’a donné un anneau royal pour le fiancer ; cette bague est mon libre arbitre. Combien grand est l’amour de Dieu pour moi : je suis créé par Sa parole et racheté par Son sang, pour mon salut les cieux se réjouiront, et pour ma destruction les anges pleureront, comme des frères sur la tombe de leur petite sœur ! Ne me demandez rien de plus : je suis un secret pour moi-même. Au-delà des mots est le royaume du silence, mais mon secret révélera l’Éternité ».
☦️ Archimandrite Raphaël Karelin