En Occident, la religion est souvent comprise comme un code moral extérieur et qui sert de norme pour juger le comportement humain. Ceux qui violent le code moral sont considérés comme des gens mauvais, alors que ceux qui y adhèrent sont considérés comme moralement bons et justes. L’objectif de la religion étant de produire de bonnes personnes, soit des gens qui suivent strictement le code moral. Et pourtant appliquer extérieurement des règles et règlements divers ne coïncide pas toujours avec une transformation de l’homme intérieur ce que les Pharisiens de l’Évangile montrent douloureusement de façon manifeste. Le salut et le Royaume de Dieu commencent de l’intérieur.
En se basant sur l’expérience empirique, la religion qui a été comprise comme un comportement moral extérieur a constitué un échec monumental. Des agendas idéologiques ont été poursuivis, des guerres ont été menées, et un nombre incalculable de personnes qui ont été opprimées, et tout cela au nom de la religion. L’adhésion externe à un code moral ne porte ses fruits que si elle correspond également à un changement intérieur, ce qui n’est guère possible si les efforts sont placés uniquement sur le comportement extérieur.
Fiodor Dostoïevski, le grand romancier russe, reconnaît les objectifs pharisiens de la religion et les rejette. Pour Dostoïevski, le but de la vie c’est l’amour, un amour qui transcende la morale et qui est capable d’apporter la guérison à l’âme humaine en proie à ses contradictions. Les Pères en disent autant. Dans la Sagesse chrétienne antique, je mentionne saint Grégoire de Nysse qui « considère l’amour [agapé] comme étant un objectif idéal sur le long terme, car il reflète la perfection divine, englobe toutes les vertus, et peut ainsi orienter le comportement chrétien à chaque étape dans la vie spirituelle ». «Ce guide vient de l’intérieur et est animé par la grâce de Dieu ». Deux traits qui sont absents dans l’observation superficielle d’un code moral.
Pour Dostoïevski, le problème posé par l’existence humaine n’est pas une question morale, mais est fondamentalement existentiel. L’homme – tout homme – est un mélange de malice et de simplicité, de chasteté et de luxure, de bonté et de méchanceté. Un de ses personnages, Dimitri dit: «Je suis un misérable, et pourtant, j’ai adoré Dieu … le bien et le mal sont en coexistence à l’intérieur l’homme. » Le Grand Inquisiteur est impressionné par cette contradiction chez les gens: des personnes corrompues sont souvent d’humeur agréable, des criminels peuvent être tendres et sensibles, alors que les moralistes puritains sont insensibles et cruels … tout le monde est également capable de bien et de mal. Comme le dit saint Jean Chrysostome, «il n’y a pas de personne juste qui soit sans péché, et également aucun pécheur n’est dénué de bonté. »
Dostoïevski reconnaît la vérité sublime qui suit: l’homme n’est pas capable de se sauver grâce à un code moral ou un ensemble de lois et de règlements. Dostoïevski démonte la prétention de l’humanisme, qui estime qu’avec un comportement éthique, il est possible d’éradiquer le mal du monde. Ce faisant, Dostoïevski fait de la théologie comme les Pères de l’Eglise: le salut de l’homme ne peut pas venir de l’homme lui-même, mais uniquement de Dieu. Dans la continuité de cette approche, la vraie spiritualité se distingue des techniques psychologiques, y compris celles qui sont employées dans la thérapie cognitive et Dostoëvskyrefuse de les considérer comme une panacée ultime, car l’homme n’est pas capable de se sauver par lui-même. Ce n’est que la relation à Celui qui est Autre, c’est-à-dire à Dieu que nous reconnaissons en nous-mêmes et en les autres l’amour auquel nous sommes finalement appelé.Cet amour se manifeste dans l’exemple sacrificiel de l’amour qui nous est donné par le Christ sur la Croix, ainsi nous devons aider à porter les fardeaux des autres avec amour.
La religion, du moins dans sa conception comme code moral doit être rejetée parce qu’elle est plus une affaire de tête que de cœur. Lorsque le point focal est la construction intellectuelle et les arguments de l’élément rationnel discursif, la religion devient grotesque. La spiritualité est un mode de vie dont l’objectif est la transformation du cœur en se plaçant en Dieu qui est la source de l’Amour. L’amour seul est digne de notre quête car l’amour seul peut nous amener au véritable accomplissement de notre destinée.
http://ancientchristianwisdom.wordpress.com/ (27 janvier 2013)